La problématique des déserts médicaux est plus que jamais d’actualité. Une étude récente de l’INSEE révèle que 50% des médecins généralistes formés pendant les années 2000 exerçaient en 2019 à moins de 85 kilomètres de leur commune de naissance et 50% à moins de 43 kilomètres de leur université d’internat montrant que la commune de naissance détermine leur lieu d’installation et expliquant que les médecins généralistes soient de plus en plus inégalement répartis sur le territoire. De fait, tout le monde s’empare du sujet… à juste titre, y compris bien sûr dans les sphères décisionnaires.
Ainsi, dans son discours de politique générale, le Premier ministre a égrené plusieurs mesures pour lutter contre les déserts médicaux.
De plus, une proposition de loi transpartisane vient d’être présentée au Parlement qui se base sur l’efficacité de la régulation à l’installation telle qu’elle existe à l’étranger et qui propose aux soignants un nouveau contrat avec la nation.
Simultanément, un rapport de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat rappelant l’existence de ces déserts médicaux juge la situation inacceptable et en voie d’aggravation malgré certaines mesures prises telle l’aide financière à l’installation. Ce rapport pointe le fait que « les médecins sont désormais la seule profession médicale à bénéficier d’un cadre purement incitatif pour équilibrer leur répartition et que la remise en cause de leur liberté totale d’installation fait toujours figure de tabou ».
Quelles sont les pistes évoquées par ces instances ou qui sont en cours de validation ?
• C’est d’abord une évolution déjà adoptée des cumuls emploi-retraite pour les médecins afin de les inciter à poursuivre leur activité. Il s’agit de permettre aux médecins libéraux en cumul emploi-retraite de bénéficier du régime simplifié des professions médicales en relevant le plafond de revenu permettant aux médecins en cumul emploi-retraite de bénéficier de ce régime. Dans le même ordre d’idée, une mesure fiscale à l’adresse des médecins en exercice proches de la retraite a été adoptée afin de les inciter, sur une période limitée, à maintenir leur exercice quelques années de plus ; ceci concerne les médecins installés dans une zone caractérisée par une offre de soins insuffisante qui peuvent ainsi décider, en même temps qu’ils font valoir leur droit à la retraite, de poursuivre leur activité en cumul emploi-retraite pendant un délai de 5 ans.
• Les députés souhaitent réguler l’installation des médecins, via une autorisation d’installation délivrée par l’agence régionale de santé, grâce à un indicateur territorial de l’offre de soins qui dresse une cartographie précise de la répartition de l’offre de soins dans l’Hexagone et en favorisant l’installation durable en limitant la durée cumulée des remplacements en libéral dans la carrière d’un praticien.
• De la part des sénateurs, c’est de conditionner toute nouvelle installation dans les zones mieux dotées à un exercice partiel dans une zone sous-dotée dans un cabinet secondaire. Il est proposé de confier à la profession elle-même les modalités pratiques d’une telle obligation selon le modèle allemand d’autogestion.
• Il pourrait aussi s’envisager de mieux cibler le remboursement de la téléconsultation et de valoriser financièrement la contrepartie aux pharmacies situées dans des zones sous-dotées qui accueillent les cabines de télé consultation.
• Il est souhaité d’amplifier les objectifs de recrutement des assistants médicaux (nouvelle profession) et de permettre aux maisons de santé pluriprofessionnelles de bénéficier des aides à leur embauche.
• Il est recommandé de recalibrer et d’ajuster les compétences de chaque profession médicale et, à ce titre, d’aboutir à une loi Infirmiers et une loi Pharmaciens sachant que plusieurs innovations ont déjà eu lieu dans ce domaine telles que certains droits de prescription des pharmaciens ou la création des IPA (IDE de pratique avancée) auprès des médecins généralistes.
• Dans le but de créer un choc de territorialisation, pourrait s’envisager la prise en compte, parmi les critères de sélection, du lieu de résidence des étudiants qui habitent dans les zones médicales sous denses lors de leur entrée en première année. En corollaire, pourrait être lancé un plan d’ouverture d’antennes de facultés de médecine dans des villes de taille moyenne à proximité des zones médicales sous-denses. Ou encore d’adapter les modalités de stages des étudiants en santé pour qu’ils soient effectués fréquemment et sur toute la durée des études de façon privilégiée dans les zones sous-denses.
• D’autres pistes envisagées cherchent à favoriser l’accompagnement des praticiens dans leur travail pour soutenir les nouveaux modes d’exercice collectif et simplifier les procédures pour reconquérir du temps médical.
Les idées ne manquent pas ! Mais, pour la plupart d’entre elles, elles apparaissent comme de simples mesures palliatives et passagères ce qui sous-entend que cette désertification médicale n’est que conjoncturelle ce qui n’est sans doute pas le cas. Reste également à voir comment la profession accueillera de telles propositions….