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Site de l’Association Amicale Santé Navale et d’Outre Mer (ASNOM)

LES LOIS FIN DE VIE : OÙ EN EST-ON ?
Article mis en ligne le 16 juin 2025

Les députés ont procédé, le 27 mai 2025, au vote sur deux propositions de loi adoptées en Commission des affaires sociales. La première qui comporte une série de mesures sur les soins palliatifs et d’accompagnement a été adoptée à l’unanimité par les 560 députés votants. La seconde qui porte sur l’accès à un suicide assisté ou une euthanasie, selon les situations des malades et certains critères, a été approuvée par 305 voix pour, 199 voix contre et près de 60 abstentions.

Préalablement à ce vote, leurs travaux ont permis d’apporter sur ces deux propositions de lois plusieurs précisions ou modifications ou d’entériner des évolutions jugées importantes dans le cadre de l’accompagnement de la fin de vie.


Les travaux sur les soins palliatifs et l’accompagnement de fin de vie ont fait consensus.

• La création d’une nouvelle catégorie d’établissement médico-social, dénommées « maisons d’accompagnement de fin de la vie » devrait aboutir d’ici 2034 à la mise en place d’une centaine de structures, soit une par département. Ces maisons seront des "structures hybrides" qui viendront "occuper l’espace entre les hospitalisations complexes et le domicile". Les aidants y seront aussi accueillis pour des séjours de répit ou de l’écoute.
• La formation continue des professionnels pour déployer la culture palliative concerne les professionnels hospitaliers dans un premier temps. Le ministère entend aussi s’appuyer sur un nombre élargi d’étudiants en médecine à compter de 2026 pour orienter ces futurs professionnels vers les soins palliatifs. La création d’un DES en médecine palliative et en soins d’accompagnement est en cours de réflexion dans ce cadre. Le financement de 6 000 recrutements spécifiques en soins palliatifs dans les EHPAD, portant surtout sur des psychologues, est prévu à compter de 2031.
• Plusieurs évolutions concernent les directives anticipées, comme l’absence d’obligation de leur rédaction, la prise en compte des directives les plus récentes ou la suppression de la possibilité de déposer ses directives sous format vidéo.
L’obligation de nommer un référent chargé de coordonner l’accès aux soins palliatifs est étendue à l’ensemble des établissements de santé et aux EHPAD.
• La redéfinition du rôle de chaque organisation territoriale spécifique est proposée autour de la coordination des intervenants (dispositif d’appui à la coordination, établissements de santé, structures douleur chronique, etc.).

Les discussions ont été beaucoup plus sujet à controverses sur l’aide active à mourir.

Pour rappel, le terme d’aide active à mourir recouvre deux pratiques distinctes selon le CCNE (Comité consultatif national d’éthique) :
L’assistance au suicide (parfois confondue avec le suicide assisté), qui consiste à « donner les moyens à une personne de se suicider elle-même » ;
L’euthanasie, « un acte destiné à mettre délibérément fin à la vie d’une personne atteinte d’une maladie grave et incurable, à sa demande, afin de faire cesser une situation qu’elle juge insupportable ».
« Ces deux actes impliquent l’intervention d’un tiers mais avec un degré d’implication très différent, note le CCNE. Dans le cas de l’assistance au suicide, cette intervention peut se limiter à la prescription médicale d’un produit létal tandis qu’en cas d’euthanasie, un médecin administre lui-même le produit. »

• Alors que, en Commission des affaires sociales, les députés avaient voté le libre choix entre suicide assisté et euthanasie dans la procédure d’aide à mourir, le Gouvernement a obtenu le rétablissement du principe d’exception pour l’euthanasie, défendant ainsi un modèle spécifiquement français de la fin de vie :
"En prévoyant que, lorsque la personne est en capacité, elle ingère elle-même la substance létale, la loi affirme que le dernier acte doit appartenir à l’individu. Ce choix permet de garantir que l’aide à mourir demeure un acte personnel". C’est ainsi la réaffirmation du primat de l’auto-administration de la substance létale, sous forme liquide, dans une procédure d’aide à mourir, qui de plus ne peut être réalisé dans un espace public.
• L’article 4 de la proposition de loi visant à ouvrir l’accès, sous conditions, à une aide à mourir, soit un suicide assisté soit une euthanasie selon les situations, précise les conditions d’accès, sous forme de cinq critères cumulatifs et intègre les derniers travaux de la HAS :
 Être âgé d’au moins dixhuit ans ;
 Être de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France ;
 Être atteint d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qui engage le pronostic vital, en phase avancée, caractérisée par l’entrée dans un processus irréversible marqué par l’aggravation de l’état de santé de la personne malade qui affecte sa qualité de vie ou terminale ;
 Présenter une souffrance physique ou psychologique constante liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable selon la personne lorsque celleci a choisi de ne pas recevoir ou d’arrêter de recevoir un traitement ; une souffrance psychologique seule ne peut en aucun cas permettre de bénéficier de l’aide à mourir ;
 Être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
• Le processus d’accès à une éventuelle aide à mourir donne la possibilité d’exprimer la demande sous diverses formes adaptées aux capacités du patient mais ne peut se faire par téléconsultation. L’examen médical de la demande est assuré par une réunion collégiale, par défaut en présentiel, entre deux médecins et un soignant.
• Autres points importants qui ont fait l’objet de modifications par rapport à la proposition initiale :
 L’’intégration de l’aide à mourir dans les programmes de formation a été rejetée comme le souhaitait la Conférence des Doyens des facultés des Sciences de la Santé.
 Les députés ont retiré le principe de considérer la mort provoquée par une aide active à mourir comme une mort naturelle.
 Le délit d’incitation à l’aide à mourir a été repoussé par les députés.

La navette parlementaire veut que les textes soient examinés à l’automne par le Sénat. Il appartiendra aux sénateurs de se prononcer sur trois questions qui intéressent au plus près les professionnels de santé :
• Le sujet de la clause de conscience des professionnels de santé est un enjeu clé pour le monde de la santé de la suite des discussions au Sénat considérant qu’il n’est "pas question d’obliger les professionnels à agir contre leur conscience". Les professionnels des pharmacies à usage intérieur espèrent parvenir à entrer dans le périmètre de cette clause dont ils sont encore exclus.
Le délit d’entrave est aussi un sujet qui cristallise l’inquiétude des professionnels de santé, d’autant plus que les peines et amendes prévues ont été doublées par les députés pour les aligner sur celui d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse.
• Enfin, il s’agira de reprendre les travaux sur la formation des professionnels de santé à la culture palliative.

Pour en savoir plus sur l’évolution en France des idées sur la Fin de Vie :
Le 20/05/2025, 20 ans après la promulgation de la Loi Léonetti, Hospimédia a publié un document retraçant l’histoire des lois françaises relatives à la fin de vie reproduit ici.

Dossier Hospimedia « Fin de vie »